RéUNION, oui,
sous les tropiques... mais pas trop...
06.02.2004
Pas trop chaud,
pas trop coloré,
pas trop plat.
Pour les lagons
bleus, les grandes plages de sable blanc, les cocotiers, demander au pilote
d’atterrir à l’île Maurice…. c'est juste à côté.
La
Réunion, c’est des plages, très peu, des lagons, pas plus, de la montagne,
encore de la montagne et pas n’importe laquelle, celle aux pitons et aux
ravines, et une spéciale, avec un volcan en activité.
Les
touristes sujets au vertige iront
eux-aussi à l'île Maurice...
C'est la
réunion de tous ces sommets, une dentelle de basaltes qui fait tout l'intérêt
de l'île, ce ne sont que : à-pics vertigineux, et sommets à conquérir.…entrecoupés de vallées étroites et autres
cascades qui sont si romantiques à admirer…
Pour les
points de vue, il faut impérativement tenir compte de l’heure, après 10h du
matin bien souvent il n’y a plus rien à voir à part les gros nuages blancs qui
dégoulinent des hauteurs.. (le système
nuageux est généré par l'alizé – bien chargé de toute l'humidité de l'océan
Indien – dès 10h du matin, il est établi, il a atteint les hauteurs, il s'est
refroidi à cet endroit et il y condense sa vapeur d'eau sous forme de gros
nuages blancs cotonneux...) résultat, dans les hauts, on est dans le
brouillard...
Le
panorama est splendide au point du jour.
Sachant que
les panoramas splendides nécessitent toujours une longue marche d'approche, il
ne faut pas hésiter à se lever très tôt pour les admirer et même à dormir à proximité.
La Réunion
c'est la réunion des volcans :
-
éteints, qui modèlent les paysages, qui s’appellent
les cirques ou les pitons. Ils couvrent les 2/3 de sa moitié occidentale, point
culminant le piton des Neiges (et quelquefois il y en a, ex : août
2003…) altitude 3070m.
-
3 immenses cirques
le ceinturent : Cilaos, Mafate et Salazie. Ces grands plateaux sont en fait des canyons aux murailles à
pic, dans un enchevêtrement complexe de vallées et de crêtes, vestige érodé de
l'ancien bouclier volcanique qui entourait le piton des Neiges soit-disant
éteint depuis 12 000 ans…
-
en activité, qui excitent toutes les convoitises... et occupent la
partie Sud-Est de l’île, c’est le « Pays Brûlé » dixit les premiers
navigateurs, pays brûlé toujours en évolution…
La Fournaise...
bien
dénommée en Août 2003, à cause d'une éruption à ce moment là, et bien nommée toujours
car c'est un super volcan, très actif, le deuxième en puissance après le
Kilauea d'Hawaii... Activité quasi-permanente et sous contrôle.…éruption genre
prévisible, avec lave très fluide qui descend sa pente, tranquille (contrairement
à l'autre type dit
strombolien, explosif , imprévisible et catastrophique.)
Et entre 2
éruptions ? La Fournaise se contente de fumer et de siffler…paisiblement.
La Fournaise c'est là qu'il faut aller en priorité, c'est là qu'il faut faire converger ses efforts dès l'arrivée, à cause des nombreuses tentatives nécessaires avant d'en réussir l'ascension par météo favorable.
C'est une marche d'une dizaine de kilomètres, dénivelée 600m (dit autrement, ascension de la Tour Eiffel 2 fois et seulement avec ses pieds...) brouillard très fréquent lié à l'altitude, la promenade commence à 2350m, on part, ça le fait et puis en cours de promenade...ça ne le fait plus, et sérieux, donc demi tour.. et allons voir si la rose... ailleurs...frustrant...
Mais quand les sommets sont dégagés, c'est d'une beauté fascinante, une immensité minérale :
- toutes les tonalités de noir et de gris rehaussées d'orange – en touche légère mais intense –
- toutes les variations, du brillant au terne,
- toutes les qualités de matière, du lisse au pulvérulent.. en passant par "les larmes et cheveux de Pélé" = cristallisation sous forme de goutte ou de filament étincelant …qui existe lors d' une activité "fontaine de lave" rejetant des laves très fluides.
Pélé est le nom de la déesse du feu
habitant les volcans des îles Hawaï…
On a devant les yeux la lave dans tous ses états de pahoéhoé ou bien de aa, non ce ne sont pas les vapeurs méphitiques de soufre qui troublent... (noms scientifiques des 2 qualités de lave... et... hawaïens encore... les noms scientifiques!)
A La Réunion nous avons surtout affaire à la pahoéhoé...
Sept 2003, 1 mois après une éruption du cratère Dolomieu... nous sommes juste au bord du surplomb qui le borde dans une zone sécurisée, mais prévenus du risque maximum d'effondrement (normal après une éruption, il est dû au soutirage de la lave) qui existe juste là, un peu plus loin... Et juste sous la croûte noire, chaud, très chaud, 270°c environ à 2m.
Tous les randonneurs qui arrivent à ce niveau sont rayonnants de bonheur...voire extatiques!
La Fournaise a ses pèlerins addicts…
C’est la promenade incontournable des réunionnais qui ont des invités…Z'oreilles…
Et les appareils photo chauffent au rouge.
Ha! les boursouflures d'un noir profond d'où s'échappent des panaches blancs,
ha! le champ de fissures tapissé de fumeroles qui dansent au-dessus...
ha! les cônes de cendre d'un gris improbable ou d'un orange surprenant, fumants aussi,
ha! la légère odeur de soufre,
ha! la fascination...le magnétisme... l'envoûtement...!
Et puis c'est le retour, il faut savoir que c'est aussi très fatigant de descendre.
Le pahoéhoé, n'est pas une surface facile, c'est lisse et très adhérent seulement voilà, les surfaces sont très tourmentées, la lave en s'écoulant se contorsionne, il faut faire attention à chaque pas.
Nous cheminons tous à la queue leu leu sur un itinéraire – dont on ne doit pas s'éloigner – matérialisé par des tâches très rapprochées de peinture blanche ... pour que entre autre, en cas de brouillard on puisse sortir vivant de l'aventure...( le volcan tue ! on tombe dans des failles, on se perd et on meurt de froid ou de faim …) on rencontre quelques croix en cours de cheminement...noires elles aussi et brillantes, en ciment recouvert de carreaux 10x10 de céramique, les joints sont blancs et bien visibles... c'est inattendu, théâtral...et fleuri de fleurs...fraîches, ceci pour la croix du gendarme Fred Hudson mort en 1993 alors qu’il montait au cratère Bory.
Il ne fait pas chaud, il faut un anorak en début de matinée……la montée à pied débute à 2350m, par une descente sur 150m, arrivée à 2200m, et inexorable ascension jusqu'à 2630m…ceci expliquant pourquoi on exulte en atteignant le bord du cratère…
Pendant la descente on est moins préoccupé par ses mollets et moins sujet à l'essoufflement et on profite plus des paysages, on distingue mieux les coulées successives, les cratères anciens, les grottes de lave (formées au sein d’une coulée de lave par un dégazement brutal…) elles sont transformées en oratoires... pour quitter la caldeira, un dernier effort, 600 marches à monter, eh bien ça pour une descente, c'est spécial.
Nous avions fait des promenades préparatoires et une tentative avortée la veille, petites mises en jambe appréciées.
Il faut faire une remarque
qui fâche…Cet endroit magique est parsemé de papier de toilette et le fait
qu'il soit surtout blanc…n'est pas une excuse… (voir plus haut), vraiment c'est
la honte, nous les français sommes la risée du monde entier parce que nous
pissons partout, et c'est vrai nous pissons partout et nous ne sommes pas aidés
pour pisser ailleurs, puisqu'il n'existe aucun endroit pour ça, à aucun moment,
ni même au départ des randonnées…
Par ailleurs les responsables du tourisme local ont su mettre en valeur et développer l’infrastructure nécessaire à toutes les activités de plein air qui séduisent : canyoning, descente en eaux vives, escalade, VTT, deltaplane…C’est un paradis pour les marcheurs de tout niveau, les sentiers sont parfaitement entretenus, et balisés (ils ont un grand défaut quand même c'est qu'ils n'indiquent pas toujours les distances), les refuges de montagne et les services d’information nombreux, mais j’insiste, des toilettes JAMAIS !
Le lendemain, plus cool, nous descendons de l'hélicoptère.
Le vol a duré 45mn avec seulement les commentaires du pilote de
"l’Ecureuil". Si on veut de la musique il faut prendre une autre
compagnie : Air Intense, et à ce moment là, l’excursion se fait au son
d’une musique éthérée, pour ce genre de
musique à mon avis on prend un ascenseur et c'est moins cher … !
Irremplaçable le survol, qui permet une vision
exceptionnelle du paysage (beaucoup d'analogie avec Hawaii), on a une belle
prise de conscience de la topologie générale, 2 grandes zones montagneuses qui
dévorent tout l’espace, séparées par une étroite plaine et au Nord-Ouest une mince frange littorale
blanche, ailleurs falaises noires.
On localise les champs de culture de la
canne, à la couleur, en fait l'île a été moyennement ravagée par ce fléau ( 50% des terres cultivables de 100 à 900m
au-dessus du niveau de la mer, l’Est et Nord-Est) car la mécanisation y est
impossible, pas de grandes plaines et dans les petites plaines des rochers
partout. La récolte était en cours, cette année 2003 sera d'une qualité
exceptionnelle.
On localise les forêts, certaines
curieusement ravagées par le cyclone Dina (janv. 2002) et on arrive bien à
distinguer les différentes essences par la variation des verts de la canopée,
et forêt originelle dans certains endroits mais il faut être prévenu pour
discerner.
On reste interloqué par le peuplement, il y
a une multitude de cases dans des endroits impossibles…
A l'Ouest c'est les lagons minuscules et tout
de suite la barrière de corail… et les grandes profondeurs… on termine le vol
dans le bleu.
( vol reporté
à 2 reprise à cause de pluie ou nuages…). Très agréable l'Ecureuil pour la
vision du panorama…
Incursion dans les 3 cirques, des falaises de toute beauté
avec au fond les "ilets" habités et pour certains ils ne sont reliés
au monde, à notre monde, que par les pieds, genre il faut marcher 5 h avec des
montées terribles pour aller ailleurs - le cirque de MAFATE, pour y
aller c'est ou à pied, ou en hélicoptère, les provisions c'est pareil.
Le paysage n'y est pas dénaturé non plus par les poteaux
électriques..
Il y a un petit confort
pour certains grâce aux batteries solaires et la télévision depuis 3 ans seulement est visible dans quelques
foyers grâce au satellite. Et la télévision est en train parait-il de
bouleverser la perception du monde.… pour certains « des hauts ».
Toujours grâce à la télévision le facteur de Mafate qui
a arpenté le cirque de 1955 à 1991 est extrêmement célèbre. Exercer son métier
dans ces conditions est unique. Il a été sujet d'émission dans de nombreux pays
même au Japon...
Son métier c'est la communication... et il s'y connaît... Il
a tout expliqué de son périple hebdomadaire et de son chargement et de l'usure
de ses chaussures, et comment la quantité de chaussures dévolue par
l'administration et par an, ne tient pas compte de ses conditions de
travail, et comment il est contraint
d'en palier les carences sur ses
propres deniers...
Cette anecdote racontée à la télé a fait un tabac et déclenché l' envoi massif
par "colis postal" d'une quantité de paires de chaussures telle qu'
il n'aura même pas assez de sa retraite pour les user… d'accord la distribution
du courrier, c'est le cirque et rien d'autre... mais c'est 130 km par semaine
avec une sacoche bien remplie par l'hélicoptère... et comme ses attributions sont
aussi de "boîte à lettres", il est toujours chargé.
Au programme du "trip" hélico il y a visite d' un
petit ravin très profond et très étroit appelé : le Trou de Fer,
on est prévenu même en petit avion ça ne le fait pas... alors là, c'est à
couper le souffle, les falaises, on a le nez dessus et elles sont tapissées de
cascades qui dégringolent vertigineusement de tous les côtés.
Mais à dire vrai on ne profite vraiment du
spectacle que, quand on est bien sûr que toutes les pales de l'appareil
tiennent entre les parois...cool ...mais après c'est le demi-tour au fond...Et
là, pas de bêtise...parce qu' on peut imaginer que "fer", le Trou de
Fer, ce serait à cause des hélicos au fond du trou, ceux qui n'auraient pas
réussi la manœuvre... le langage créole est très imagé, quand on sait qu'il
nomme le suppositoire : "bonbon la fesse"... on peut tout imaginer...
Le Trou de Fer, c'est le top pour le
canyoning, on comprend pourquoi le raid gitane est passé par-là.
Au programme il y a aussi survol du volcan
alors en avant… au-dessus du volcan… et il y a de l'espoir, jusqu'à maintenant
on voit bien (on fait le premier vol, celui de 7h du matin).
Trop tard ! le premier vol, les nuages
ravagent en 5mn l'espoir d'en voir un morceau d'en haut… demi-tour, on rentre.
On ne verra pas d'en haut les coulées de lave qui ont dévalé jusqu'à la mer…
En revanche ce qu'il faut voir d'en bas ce
sont les vagues à l'assaut des coulées. Leur effet sur les falaises de lave
fabrique des murs d'écume d'une hauteur impressionnante et d'une transparente
irisée, on reste des heures à en regarder l'éternel recommencement et à en recevoir les embruns sur le
visage...
Les 2 autres cirques aussi survolés, sont accessibles
même en voiture...
Et alors là, chapeau la DDE, nous avons des
routes slaloms superbes, l'angle des virages est travaillé au quart de degré,
le revêtement est d'une planéité inconnue ailleurs, pourtant ce sont les
bas-côtés les plus admirables... des parterres de fleurs travaillés par
l'homme. On est en montagne donc parterres en terrasse, et la terre retenue
souvent par des "canisses" en osier tressées de la main de l'homme...
le tout bichonné, désherbé de la main de l'homme et peut-être sur certaines
routes ne sommes-nous qu'une vingtaine par jour à admirer le bel ouvrage... des
hommes de l'emploi vert.
Une manière locale de résorber le chômage...
et c’est pas demain la veille… même en plantant des fleurs partout… en
attendant, parlons du RMI, nous ne sommes pas tous égaux devant celui-ci,
certains sont plus égaux que d'autres...en Métropole par exemple il est 20%
plus cher...
Continuons à jeter des fleurs à la DDE qui a
réussi à SAINT-DENIS, la préfecture, la route la plus technique du monde,
(c'est la plus chère aussi)... C'est une 2 fois 2 voies avec voies d'arrêt
d'urgence. Elle avait besoin d'exister coincée entre une falaise verticale de
basalte de 120m de haut, et la mer...
Nos ingénieurs qui ne sont pas des manches se
sont attaqué au problème depuis 1963, ils améliorent au fil du temps les
possibilités de circulation. Ils ont surélevé légèrement la route par rapport
au niveau de la mer et ils ont creusé légèrement la roche au niveau la falaise,
comme ça il y a la place pour 6 voies, car tout est prévu… les jours où l'océan
fait sa petite tempête, et les jours ou
il pleut tellement que le ruissellement des eaux sur la falaise entraîne les
blocs de pierre sur la chaussée...
Pour palier au deuxième cas, ils ont habillé
d'un maillage d'acier les murs de falaise (maillage utilisé au cours de la
deuxième guerre mondiale contre les incursions de sous-marins donc bien solide
et posé par des alpinistes), il ne s'agit nullement d'un grillage à poules, il
est inopérant pour les pierres qui ne font pas la maille... 15cm par là, dans
ce cas, au secours! il pleut des pierres… il faut neutraliser deux voies...
C'est à ce moment-là que les ingénieurs sont
ingénieux, ils ont inventé une machine unique au monde pour déplacer les plots
en béton de séparation du sens de circulation des voies et hop! dans ce cas on
se translate vers la mer d'une voie, les autres dans l'autre sens roulent sur
la voie d'arrêt d'urgence et hop! on est toujours sur 2 fois 2 voies et le tour
est joué.
Quand l'océan dépasse les bornes, même
outillage, même manœuvre vers la falaise cette fois, et hop! 2 fois 2 voies toujours.
Ce petit déménagement (ça s'appelle basculer
la route) a lieu en moyenne 55 fois par an, mais tous les jours c'est entretien
balayage des cailloux, toutes les 2h un camion-aspirateur de cailloux, parcourt
inlassablement les voies, côté falaise, pour les débarrasser des pierres qui
tombent, continuellement.
Je suis fière que nos ingénieurs des Ponts et Chaussées aient réussi cette
performance d'autant que comme c'est
une section qui ne roule pas du tout, pour cause de bouchons, nous avons tout
le loisir de profiter des 13 km de l'exploit.
Donc en route pour CILAOS, admirable et
terrifiante la route, des lacets, des tunnels, des viaducs et des chutes de
pierres, des gros morceaux qui ne font pas joli sur le capot.
La petite ville est charmante et désuète et
se prête de très bonne grâce à la déambulation. C'était une ville d'eau au
début du XXème et elle essaye de remettre en scène le charme de
l'époque, d'une part en accueillant tout un chacun dans les thermes pour une
petite séance hédoniste, sans implication médicale, d’autre part en
embouteillant l'eau (genre Badoit) que l'on boit dans les restaurants en
contrepoint du vin fabriqué aussi sur place, sous les tropiques, à 1200m... à
partir d'un cépage interdit en Métropole (cépage Isabelle… qui ne serait pas
d’une innocuité totale pour le système nerveux...méthanol ?…). Il se boit
en apéritif... et comme on a l'anti-dote dans la bouteille d'à-côté, bon, ça le
fait , mais ce n’est pas inoubliable...
La
coopérative vinicole a travaillé sur 3 autres cépages et elle vinifie un vin
apparenté au Xérès, soi-disant, ce n’est pas évident à la dégustation…
Surprenante aussi la culture intensive des
lentilles...
Inattendue, la production artisanale
d’essence de géraniums…(La Réunion est en tête des producteurs mondiaux) chaque
petite famille a son petit alambic et distille tranquillement le parfum des
feuilles apprécié rue Saint-Honoré à Paris.
Stupéfiants les travaux d'aiguilles... de
l'école de broderie des religieuses de Notre Dame des Neiges, les élèves
s'arrachent les yeux pour faire des merveilles arachnéennes.
Ce qui fait pleurer c'est qu'une trentaine de
brodeuses professionnelles s'ingénient à faire des jours admirables sur des
choses complètement obsolètes, genre: napperons, mouchoirs, robes de baptême,
chemisiers de grand-mères « dan'tan lontan », que des trucs de bonne
sœur soit dit sans les vexer.
On ne peut pas acheter ça!
Alors elles mettent ces jours merveilleux
sous verre, alors ils se détachent sur un fond de papier de soie bleu pastel… c'est moins cher, c'est moins
pire, mais ce n'est toujours pas folichon,
dans la maison.
Allons à SALAZIE, et là, c'est
parapluie, c'est le cirque le plus à l'Est et il ramasse en priorité
l'humidité, les ravines sont tapissées de cascades, l'eau coule partout, par
moment on a même l'impression qu'elle sourd de la roche…à gros bouillons, la
végétation suit, on marche sur les grenouilles et les moustiques implacables
hélas, attaquent d'autant plus aisément que le Off dont on se pulvérise est
tout de suite dilué…mais quelle beauté où que l'on regarde c'est cascade,
arc-en-ciel et autre voile de mariée, qui descendent des nuages….
Accessible en voiture ce cirque est très
touristique, il y existe encore un habitat créole, très bien mis en valeur par
un fléchage explicite.
Hell-Bourg avait aussi ses sources
thermales...(taries) où jusqu'en 1920 la haute société coloniale menait grande
vie et se faisait construire des "cases de changement d'air"…
Une particularité architecturale de ces
villas coloniales: les guétalis, ce sont des kiosques fermés par des
moucharabieh construits dans le jardin de la propriété, à un endroit
stratégique, d'où l'on pouvait voir sans être vu ceux qui passaient dans la
rue.
Ici la spécialité agricole c'est culture de
chouchou (sur les marchés à Paris cela s'achète sous le nom de christophine),
et culture c'est vite dit, ça pousse tout seul et ça tapisse les ravines, c'est
servi à toutes les sauces dans les restaurants, et ils ne nourrissent pas que
les touristes avec, c'est une région d'élevage intense de volailles, de porcs…
de truites, d'ailleurs par endroit cela se sent!
Nous avons fait une promenade de rêve à la
recherche d'une cascade, donc parmi les moustiques, les crapauds et les
grenouilles, le chemin suivait le bord d'une cressonnière en terrasses et en
cascade d'une longueur inouïe.
Et il n'y a pas assez d'habitants (706 300)
plus les touristes pour manger toute cette production de cresson…ça c'est sûr,
cultivé pour le fun alors...?
On ne rencontre pas grand monde lors des
promenades à pied, mais en voiture c'est de la folie. On compte 1 voiture pour
3 habitants, 240 000 voitures par là alors aux heures de pointe, c'est la
réunion des bouchons et grave il faut une demi-heure pour traverser une petite
ville de rien du tout et que les
voitures de l'île soient en majorité blanches ne fait rien à l'affaire ou peut-être que si, blanc, symbole de
pureté c'est pour faire oublier que l'essence utilisée sur l'île est fournie
par le Bahreïn, raffinée à minima et
polluante à maxima.
Avec cette essence là, nous avons traversé
l'île par l'unique route qui s'immisce entre montagnes et volcans c'est la
route de La Traversée, elle traverse des petites villes qui s’appellent :
Entre-Deux, Le Tampon…et comme ils n'avaient plus d'inspiration , les autres
villages se nomment qui, Le Dix-neuvième qui, Le Vingt-Septième et qui sont en rapport avec l'éloignement en
kilomètres.
Ailleurs, les noms des petites villes sont
dédiés à tous les saints…Denis, Benoît, Paul et les autres… les petits villages
ont des noms incroyables pour un Z'oreille, Ilet à Bourse…Ilet à Malheur.
Le créole est un vrai régal et au sens propre, par exemple: "le
poulet la route", pas de soucis, c'est du poulet et grillé au bord de la
route, là où sont les clients…moitié boucané
au cours de la cuisson, il est proposé surtout le dimanche, parce que le
dimanche, c'est pique-nique pour tout le monde.
Des lieux (sans toilettes, mais qui ont à
voir avec l'emploi vert…) sont merveilleusement et richement aménagés dans
toute l'île, avec kiosques hexagonaux, tables et bancs en bois sur plate-forme cimentée, un peu plus loin,
un BBQ et une poubelle… Les kiosques
sont très nombreux et très prisés, et pour passer un bon dimanche, il faut arriver
tôt pour le réserver...
D'habitude ces endroits là sont fréquentés
par les animaux sauvages qui se nourrissent à peu d'effort eh bien à part des
chats harets, des animaux sauvages nous n'en avons pas vu beaucoup, ils ont
tous été dévorés il y a belle lurette,
ou par les marins avides de chair fraîche, ou par les esclaves marrons…même
cette pauvre chose à moitié musaraigne à moitié hérisson, le tangue (originaire
de Madagascar)… est accommodée, là sincèrement, il faut avoir faim…
Il reste des oiseaux, mais les petits, pas
les gros comme le DODO passé au fil de la broche à rôtir…pendant que les
tortues étaient servies en soupe…dans certaines forêts des hauts il y a des
vaches marrons (mot à prendre dans ses 2 sens), on les accuse de ravager le
biotope par leur piétinement et leur gourmandise.
La gageure c'est de voir un caméléon
(introduit), c'est un exercice difficile, voire impossible sans assistance
locale.
Si les espèces animales ne sont pas très représentées,
les espèces végétales si, c'est très riche, avec des forêts magnifiques,
opulentes, de bois de couleurs ou de cryptomerias (introduit), ah! les couleurs
chatoyantes des troncs de cryptomerias…
fougères arborescentes, avec sous-bois très
fourni (tapis de fraisiers par exemple… fushias…hortensias…). Et les lieux plus
arides sont colonisés par des épineux, ajoncs, acacias, indifféremment appelés:"
Zépinar "en créole.
Un moment magique… au cours d'une promenade
dans une forêt domaniale du "pays
brûlé", aride donc, (peuplement acacias, filaos, pandanus) je découvre,
moi toute seule, au bord de l'allée, des orchidées (sous la forme liane
grimpante, même pas fleurie..) et en y
regardant de plus près, j'observe moi toute seule, que ces orchidées étaient
liées au tronc d'un arbre par du raphia, la main de l'homme est nécessaire pour
ça…? et un peu plus loin, de la main de l'homme encore, sur une pancarte "privé, pas entrer",
alors seulement j'ai compris moi toute seule, qu'il s'agissait d'une culture
"marron" de vanille (qui est
une orchidée…). Quel moment exquis… enfin façon de parler, pas la saison!
Loin des fermes de vanille et autre
coopérative, dans un biotope idéal, chacun cherche la richesse… donc quand on
n'a pas les yeux dans sa poche, on voit des pieds de vanille dans les forêts
domaniales (tout aussi bien au bord de la route), qui grimpent à leurs troncs
de prédilection, pandanus ou filaos .
Pour la récolte de cette "vanille la
forêt" je ne sais pas comment
ça se passe. Pas facile de ne pas se faire barboter les "gousses la
fortune"… ça doit saigner dans les bois à la saison de la récolte…
La vanille a été introduite du Mexique en
1819, sans son insecte personnel pollinisateur mexicain résultat elle doit être
fertilisée à la main selon la technique de 1841 mise au point par l'esclave
créole Edmond Albius, courage Edmond, pour récupérer les droits d'auteur !
Réunion l'île intense… pour les couleurs je
ne dirais pas ça.
Les voitures sont en majorité blanches, les
architectures civiles sont blanches ou pastel, toitures comprises, les
architectures administratives coloniales sont superbes inspirées TRIANON et
dans les tons pastels du siècle de référence, les architectures plus récentes
Annexe-Mairie, Ecole ou Gendarmerie sont toutes repeintes de frais, de très
frais, même, genre nécessité emploi pinceau… c'est rutilant…il n'y a pas
l'équivalent en Métropole pour l'entretien des bâtiments administratifs.
C'est au Sud-Est de l'île que les cases sont
les plus colorées c'est aussi là que l'on voit le plus de "cases la
misère".
Le pignon de cette dernière est recouvert de
boîtes de conserve (5kg) ouvertes sur la longueur, aplaties, assujetties et
peintes…
Une véritable folie pour les tags,
voilà où est la couleur, de même que dans les oratoires… édicules très nombreux et privés? (grilles
fermées avec un cadenas) toujours
kitsch…isolés, au milieu d'un champ, près d'un cours d'eau, au bord de la route
et dédiés surtout à la Vierge mais pas seulement…
Les bonnes sœurs d'ici qui sont aussi de
saintes femmes ont "canonisé"
un saint "endémique" EXPEDIT.
Elles avaient commandé dant'an lontan une
effigie en Europe, à la grâce de Dieu… Le paquet arrive, dévasté, la statue
légèrement ravagée, d'ailleurs la sainte tête est cassée, impossible de
reconnaître qui que ce soit dans ces conditions. A part l'adresse, sur le paquet figure un seul mot : expédit…
tout le reste est déchiré, illisible…
Ha oui, mais c'est… bien sûr…
Saint-Expédit, en déduisent les
religieuses, et voilà comment dans les oratoires de l'île de La Réunion, on
peut aussi prier Saint-Expédit qui a la tête aux pieds.
La Réunion
qui est soit disant le carrefour des races, est plus sûrement toutes races confondues à la mode "Carrefour " sans couleurs, sans style et surtout sans les saris indiens…et indienne le quart
de la population pourtant, mais grâce à elle, les curries massala tiennent le
haut du pavé, dans la cuisine haute en couleurs et haute en goûts.
Et aussi surprise! ce sont les cheveux des
réunionnaises qui "flashent"… Elles sont en grand nombre rousses,
elles obtiennent toutes la même nuance
quelle que soit la couleur de départ,
roux éteint ou blond-vénitien… voilà le résultat de "la mode
pays". Bravo L'Oréal!
Un beau jour c'est le dernier matin, et la
dernière fois où nous voyons l'eau du lavabo s'écouler dextrogyre…!
Françoise Lebraud - Le Glas
Photos grand format sur le site de Jean-Marie : http://jleglas.free.fr/galeries/Reunion/index.htm