Lustugrandcru,

06.02.2004

 

Ils s’y étaient tous mis, j’avais bien compris .

 LE VIN et sa dimension divine,( du vin… divin…)

 

J’avais réfléchi : le vin et sa dimension symbolique, le vin de messe, le sang du christ .

 On ne peut pas prendre de la bibine ? d’un autre côté attention à séparer la piété et le péché, comment réunir le vigneron et le goupillon ?

Avec quoi font-ils au moment de l’Eucharistie ? pour réussir la transsubstantiation dans la foi ?

 

En clair : Quel cépage pour le vin de messe ?

 

D’abord on peut légitimement penser que la vigne produira du vin rouge, eh bien pas du tout :

 

LA France célèbre de nos jours la messe au vin blanc qui est jugé moins salissant….

 

Quant aux pays non producteurs, ils choisissent en priorité des vins qui se conservent bien après ouverture, genre Porto.

 

Seule règle à respecter : officier avec un vin « naturel » .

 

Les voies du seigneur sont impénétrables.

 

 

 

LA MITRE et le BORDEAUX

 

Château PAPE CLEMENT

 

Pessac, GRAVES, cru classé.

 

Ce cru est l’un des plus anciens sinon l’un des tous premiers du Bordelais.

 

L’histoire commence à la fin du XIII, quand Bertrand de Got archevêque de Bordeaux reçoit en cadeau le vignoble de la Mothe.

Très féru de technique il devient « clergyman-viticulteur-édificateur de vertu » :

Pour faire régner l’ordre moral dans ses vignes, il décida que seuls les couples dûment mariés pouvaient y vendanger, et alors ?

Et alors, on manque d’informations pour savoir  si cette mesure a mis fin à tout batifolage, mais les historiens restent très septiques sur l’efficience  de la mesure.

Ne parlons pas de résultat, il n’y a que l’intention qui compte, Bertrand de Got sera élu pape sous le nom de Clément V en Juin 1305 .

 

Nb : En 2001 les vendanges seront encore manuelles, hauts les coeurs  vendangeurs et vendangeuses. 

 

 

LA KIPPA et le BORDEAUX

 

La liste des châteaux qui font du casher est impressionnante, d’autant que les vins casher sont pré-vendus et bien payés.

Comment faire un grand cru dans la crainte de dieu ?

C’est simple. Il n’y a pas à discuter. Il faut respecter la LOI.

C’est à un laïque, salarié, « observant »  - qui se conforme dans tous ses gestes et moments de sa vie à la loi talmudique -  à qui la tâche incombe.

La vendange peut être faite par n’importe qui ( marié ou célibataire, voir plus haut) mais à partir du moment où le raisin arrive dans les chais, ça ne rigole plus.

Même si le maître de chai du château reste le véritable vinificateur et décide de ce qu’il faut faire, c’est l’observant et lui seul qui peut manipuler les appareils, même en cas d’urgence.

Tant pis si c’est l’heure de « muter » le vin liquoreux, quand c’est l’heure du shabbat, c’est l’heure du shabbat, y a pas à discuter voir plus haut.

L’observant se conforme en tous points aux règles alimentaires rassemblées dans sa bible du chai si on peut dire(la Cashrout),

 quand il a un petit doute il téléphone  au rabbin de son école ( STRASBOURG ou TOULOUSE ) toujours disponible pour lui dire comment faire pour ne pas compromettre la pureté casher…

L’observant traite tous les matériels selon des critères d’hygiène précis et le travail terminé, il scotche tout ce dont il s’est servi, inscrit son nom sur les rubans, jusqu’à la prochaine fois…

 

La qualité dans ces conditions ?

Pas vraiment idéale disent les dégustateurs «  goys. » Mais ça n’était pas le sujet.

 

LA CHECHIA et le BORDEAUX

 

Peu à dire.

L’interdiction du vin par le coran n’empêche pas son usage.

Le pieux «  persan » riche laisse aux juifs et aux chrétiens le soin de vendanger le raisin de le transformer en vin mais il ne se gêne pas pour en boire.

 

LE SANS CHAPEAU et le BORDEAUX

 

Les protestants ont façonné le vin de BORDEAUX .

 

L’affirmer pourquoi pas, le prouver encore mieux.

Les régions littorales de l’Atlantique et de la méditerranée, constituent un long chapelet de vignobles créés, par et pour, les européens du nord, Anglais, Néerlandais, Allemands, Scandinaves, amateurs de vins naturels ou fortifiés et d’alcools de vin. C’est ainsi que les vignobles de Cognac, BORDEAUX, Porto, Xérès, Madère, Malaga, Alicante, Marsala, Samos, Chypre se sont constitués sous l’impulsion de négociants protestants venus se fixer dans les ports pour rassembler les vins préférés de leur clientèle.

 Tous ces produits portent la marque de leur goût.

 

Dans l’univers protestant boire n’est pas s’abandonner, encore moins s’enivrer, c’est une nécessité biologique comme manger  il n’est pas question d’en abuser  et à chaque gorgée on médite sur la condition humaine en se rapprochant du Très Haut.

 

PROLEGOMENES  effectués, le bordeaux, le bordeaux…

 

Priorité au cépage Cabernet-Sauvignon qui se livre admirablement à l’exercice.

 Consommé précocement il craint un max : il développe de puissants tanins qui donnent aux vins jeunes une dureté réelle qui alliés aux tanins du chêne des barriques neuves n’améliorent pas son cas, donc dans ces conditions on n’en boit pas beaucoup, alors on attend, on attend que ça s’arrange, et on attend longtemps, alors il est devenu si cher qu’on le sert avec parcimonie et délicatesse (il passe pour un vin de malade autant dire qu’il ne peut pas être consommé avec excès)

On boit « consciencieusement » dans l’Europe protestante, au cours de l’après dîner dans les bonnes maisons,  entre hommes, au salon,  en parlant, de rien, d’un ton détaché….c’est le moment et l’endroit où on sert le porto and so on…

 

Nb les anglais ne boivent pas au cours du repas et on ne dit pas quel repas ? il faut en voyage avec une compagnie aérienne anglaise par exemple ne pas oublier de prendre le vin du repas en même temps que l’apéritif, sinon on attend le café pour se désaltérer, et quand on a soif on boit le café…

 

Comme il s’agit aussi d’un bienfait du Très Haut, il faut soigner l’aspect visuel du vin : même lorsque le Claret devient plus sombre, (le pinpin)  il faut qu’il soit d’une limpidité irréprochable, alors on le soutire, on le colle, on le décante, et on le sert dans des verres de cristal, sur du linge de table blanc ou de l’acajou vernis qui reflète si bien les chandeliers d’argent et la flamme vacillante des bougies…( qui nous rappelle combien notre vie ne tient qu’à un souffle ?…. Et ça c’est vrai il y a toujours des bougies sur les tables protestantes ; et moi ignare  à La Barbade  dans les premiers séjours et les restaurants middle classe, j’en avais déduit que les bougies posées sur la table avaient un rapport avec d’éventuels moustiques….(mais ça le faisait pas bien!)

 

Pas d’ivresse ! et le flacon ?

 

Le flacon aussi doit tout à l’Angleterre. D’abord son usage, au XVIII, permet  de se rapprocher du consommateur, qui n’est plus obligé d’acheter une barrique entière .Et  la plus value de l’opération au lieu de revenir à l’importateur revient à l’exportateur…( money is money )

.Au niveau technologie, l’Angleterre a perfectionné ce qui se faisait sur  le continent : le verre noir obtenu dans des fours chauffés au charbon de terre est plus propice au vieillissement du vin ; sa forme évolue vers le cylindre, rien à dire on la tient bien en main.

Qui plus est la forme suggère  déjà l’austérité, son épaulement permet de retenir un éventuel dépôt …

 

Le contenu et le contenant  pile poil calqué sur l’art de vivre anglais. Raffiné, so chic ! et pratique à la fois !

Et les étiquettes ? Noblesse et sobriété ! rectangulaires symétriques, à la typographie nette présentant une façade du château ou non mais sans ostentation.

C’est Pierre-Marie Doutrelant qui a mis le doigt sur les arrières- plans culturels de la forme des bouteilles : « Regardez la forme des bouteilles de bordeaux et de bourgogne. La première, parpaillote et collet monté. La seconde, ecclésiastique et pansue. Il y a des écoles françaises du bon vin. » [ Les bons vins et les autres, Seuil ]

 

 

 Françoise Lebraud - Le Glas

 

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