06.02.2004
LA BARBADE EAU
LA LA….. !
Ou Balné eau time dans une anse tranquille.
Il est 7h15 à
Miami Beach, les baigneurs sont nombreux, noirs, tous immergés jusqu’au cou,
disposés en cercle lâche, relativement immobiles mais bruyants, colorés.
Le spectacle
est insolite.
C’est le bain
du matin. Il a ses abonnés, il est très ritualisé, à visée hédoniste et
thérapeutique certainement :
-
bienfait d’une immersion dans une eau
calme et tiède, comme partout,
-
bienfait d’une recherche de lien social avec échange verbal et…
nourrissier comme on va le voir avec le suçotage d’un fruit et ça c’est bien
particulier comme procédure.
L’endroit est
superbe, la baie de sable rosé est remplie d’une eau d’un bleu transparent
doucement remuée par une ondulation subtile, ce qui lui donne un reflet laiteux
au bord, sa température est douce ( 26°C) l’hiver. L’endroit est fréquenté par
les autochtones.
A cette heure
là, la population est âgée, hommes et femmes, en maillot de bain ou assimilé,
mais le truc très couvrant et qui n’a
pas les couleurs de l’aube, de nombreuses dames ont en plus un bonnet de douche
de ton vif … ou un sac de super marché, sur la tête. Voilà pour la couleur.
On entre dans
l’eau comme on entre dans un salon, en souriant et en saluant autour de soi,
on est accueilli par des paroles de bienvenue,
d’encouragement, on se dirige vers sa coterie, qui fait déjà trempette, en
marchant (personne ne sait nager vraiment ), jusqu’à avoir de l’eau à la
poitrine, tout en maintenant hors de l’eau, pour certains, un pochon en
plastique rebondi.
Avec le
groupe élu, vaguement, si on peut dire ça comme ça, disposé en cercle, on
échange des blagues, on rigole, on peut chanter, même des cantiques.
Les pochons
s’ouvrent, ils contiennent des fruits.
Epluchage, si
ce sont des pamplemousses ou des oranges, puis partage et suçotage des
quartiers ( les fruits sont des cultivars très
rustiques avec aponévrose très coriace tout à fait immangeable ). Les mangues
aussi sont appréciées sur ce spot ( cultivar à fruit très petit et très fibreux
en réalité très peu de chair autour du noyau) . Elles sont mâchouillées avec la
peau , SEULEMENT après avoir été, comme les quartiers d’agrume ou les tranches
de melon …d’eau… TREMPEES… DANS
L’EAU DE MER…..
Le pochon
sera jeté dans l’eau, de même que noyaux et épluchures, ces derniers attirent
des troupes de jeunes poissons brouteurs comme les sergents majors suivis de
quelques orphies…charmant ! Très critiquable en revanche l’abandon du
pochon de plastique, qui s’il croise le chemin d’une tortue va être confondu
avec une méduse, le mets favori, donc avalé…pas grave pour les qualités nutritives
nulles, c’était seulement la mort en poche plastique..( par occlusion
intestinale !)
Et puis
voilà, c’est l’heure du départ, tout le monde est content, comme on est entré,
on part, avec souhaits et au revoir et la promesse du lendemain, on regagne le
parking et la voiture près de laquelle on se déshabillera,
Miami-Beach
est vraiment une baie enchanteresse…pour les blancs aussi, nous sommes
chaleureusement acceptés dans cette tiède eau fraternelle, reconnus après
plusieurs sessions, voire attendus d’une année sur l’autre, mais encore jamais
jusqu’à ce jour et 24 séjours, conviés à une dégustation, c’est donc pour
nous :
Mi-Ami-Beach
seulement.
Pour ceux que
l’immersion répugne parce que l’eau est trop salée…et trop chaude, il
existe l’aspersion, si, si, si, c’est de l’eau douce, c’est la pluie tr’eau-picale : trop soudaine, trop froide, trop
grosses gouttes, trop souvent, trop grand plaisir quand elle s’arrête à cause
de l’arc en ciel qui lui succède.
En attendant
l’arc en ciel, la pluie tombe drue, comme un rideau, qui fait disparaître
formes et couleurs, c’est gris à l’infini du sol au plafond…Si, si, si, c’est
comme ça, disparition du sol, si, sol, si, sol, et voilà la grenouille ravie qui apprécie et le soir elle le siffle sur 2 notes..
Elle est
minuscule, grande comme l’ongle du pouce à peu près, la whistling frog :
Eleutherodactylus johnstonei, elle colonise les endroits humides, extérieur et
intérieur, exemples : parterre et pot de fleur ! à l’intérieur, le
pot de fleur n’est pas indispensable, exemple : salle de bain ! ou
ailleurs puisqu’elle est eau addict…
Et quand elle
s’égosille c’est monotone très vite et d’autant que petite comme elle est, elle
se débrouille magistralement pour faire résonner la chanson…incognit’eau ! (100 décibels à 1,50m) solo ma non troppo,
on l’entend beaucoup en chœur dès 18h au coucher du soleil ( je devrais dire LE
grenouille c’est seulement le mâle qui coasse ).
Jusqu’à très
récemment elle était spéciale caraïbe avec petits caractères insulaires
particuliers, et puis un jour elle ( Eleutherodactylus coqui de Puerto Rico) a débarqué à HAWAï BIG-ISLAND mêlée à la terre dans des bacs de plantes exportées. Très
contente du voyage, elle s’égosille maintenant à Big Island, depuis 1990 sur 11
spots, à Maui sur 30 spots, à Oahu sur 1 spot ; spots où les hawaïens essaient de la circonscrire
à défaut de l’éradiquer (avec un pesticide à base de caféine….)
Eleutherodactylus
planirostris en provenance des Bahamas s’est installée en 1996 à Big Island (3
spots), à Oahu (2 spots).
Les
hawaïens ne sont pas contents du tout, ils n’aiment pas la chanson – KO KEE, KO
KEE – à l’infini....toute la nuit…
Certains
crabes aussi, apprécient moyen, l’eau de pluie.
Les touloulous ( barbados red crab – ocypodidae sp -) qui vivent près des
plages et sont des
crabes de terre magnifiques, bi-colores, bleu
foncé cerclé de rouge vif pour le corps puis rouge vif évoluant vers le jaune
pour les pattes ( et tout ça sans cuisson…), ils vivent le jour dans des
terriers peu profonds et bien sûr en cas de pluie c’est inondation,
alors pas fous les touloulous, ils montent sur quelque chose, marches
d’escalier et pour les plus radicaux, c’est ascension sur un mur pourvu qu’il
soit pourvu de petites aspérités et jusqu’au premier étage, facile ! et eux
aussi sont salle de bain addicts…par ventilation…
Nous
étions deux dans la baignoire un matin, lui tout ratatiné dans la bonde, invisible,
et moi avec mes grands pieds au fond je manoeuvrais les robinets, le touloulou
n’a pas aimé du tout la douche bouillante, il a giclé, en hurlant et j’ai fait
la même chose !
C’est
fréquent les crabes à l’intérieur, par grande pluie, les maisons sont ventilées
grâce à des claires voies, donc pas de soucis pour se faufiler si on ne fait
pas la maille.
Voilà comment
on partage sa savonnette, les geckos ( tropical house gecko – hemidactylus mabouia-)
qui poussent des petits
aboiements au cours de la nuit.. font un affût au même endroit, pour traquer le moustique de salle de bain et l’autre est eau’dieux,
il rode dans la combi ou le harnais humide, se réfugie dans le verre à dents pour y pondre…
en digérant la première gorgée de sang.
( C’est
l’abominable moustique de nuit, il gratte, mais il ne donne pas la dengue
celui-là .)
Voilà
un aperçu des anim’eaux de salle de bain.
Eau’trement il y a le crapaud des soirs de pluie mais lui reste
dehors et c’est un maousse costaud qui peut atteindre 22 cm (geant toad -bufo marinus- ) marinus je ne sais pas pourquoi peut-être parce que son cri d’amour
s’apparente au bruit d’un moteur de bateau…et c’est pas un rapide du
déplacement…
Il a été
introduit à plusieurs reprises comme prédateur des vers et insectes bouffeurs
de canne. Et le voilà maintenant
vecteur de leptospirose, sachant cela, il faut absolument empêcher les petites
filles de l’embrasser, d’autant plus que la transformation en prince charmant
est très rare, et que même si ça le fait, la façon dont ils sont habillés est
totalement ridicule et que cela serait complètement la honte pour elles.
On oublie le
prince charmant… ! On regarde le crapaud de loin ou comme Claude DEBUSSY
comme un objet d’art.
Il avait une
tendresse particulière son objet fétiche qui représentait un crapaud, il le
plaçait sur son bureau, il l’avait surnommé ARKEL et l’emportait même en
voyage…
Orage ! eau des Espoirs…à Barbados, un
peu toute l’année.
Françoise
Lebraud - Le Glas